Session de septembre 2024 : six priorités à retenir du discours d’ouverture de Vital Kamerhe
L’Assemblée nationale a ouvert, le lundi 16, sa session ordinaire de septembre 2024. Vital Kamerhe, président de la chambre basse du Parlement, a annoncé quelques priorités : parachèvement du processus de mise en place et d’installation des organes techniques, adoption de la loi de finances et contrôle parlementaire renforcé sur certains secteurs clés. Mais pas seulement.
C’est une ouverture solennelle inédite, tenue le 16 septembre, marquée par la participation exceptionnelle et l’allocution d’Adama Bictogo, président de l’Assemblée nationale de la Côte d’Ivoire. Cette première session budgétaire de la législature, au-delà de l’examen de projets de loi de reddition des comptes de l’exercice 2023, de la loi de finances rectificative 2024 et du budget 2025, met en avant plusieurs priorités stratégiques. Talatala en a retenu six du discours d’ouverture de Vital Kamerhe, président de l’Assemblée nationale congolaise.
1. Ultimatum pour finaliser l’installation des organes techniques
Vital Kamerhe a martelé l’urgence de finaliser le processus de mise en place et d'installation des organes techniques : groupes parlementaires, commissions permanentes et comité des sages. C’est un processus qui a commencé depuis la session ordinaire de mars. Le président de la chambre basse du Parlement a même lancé un ultimatum aux « groupes parlementaires qui n’auraient pas encore finalisé leur constitution et la composition de leurs bureaux à y procéder dans la célérité » et leur a accordé 72 heures, soit jusqu’au jeudi 19 septembre à 18 heures précises pour déposer tous les documents requis aux cabinets du premier vice-président et du rapporteur.
Il leur a rappelé que « sans les groupes parlementaires, il sera difficile, [voire] impossible de constituer valablement les commissions permanentes et le comité des sages. Et, sans les présidents des groupes parlementaires et des commissions, la conférence des présidents, organe important de la chambre basse du parlement, ne peut être constitué et ne peut fonctionner». Rappelons que c’est la conférence des présidents qui examine les matières à aligner dans le calendrier des travaux pour une session ordinaire.
2. Vote de la loi de finances
Constitutionnellement, la session de septembre est essentiellement budgétaire. Kamerhe n’a pas manqué de le souligner. Le président de l’Assemblée nationale a souligné les défis qui marquent le « contexte économique mondial », notamment « des incertitudes, des crises alimentaires, des défis climatiques et des tensions géopolitiques.» Dans son allocution, Kamerhe a exhorté les députés, « en tant que représentants du peuple » de « veiller à ce que le budget de 2025 reflète une réponse adaptée à ces défis, tout en restant centré sur les priorités qui concernent directement les concitoyens. »
Parmi les priorités essentielles de ce budget, il a appelé ses collègues à insister sur quatres éléments :
- Sécurité et stabilité nationale : « Face aux défis sécuritaires que connaît le pays, il est impératif d’accroître le financement de la défense nationale et de renforcer les capacités de forces armées », a-t-il plaidé. Tout en encourageant les efforts du gouvernement sur le plan militaire et son implication dans les processus de Luanda et de Nairobi, le speaker de la chambre basse du Parlement a suggéré que l’Assemblée nationale contribue à l’élaboration d’une stratégie globale. Celle-ci devrait couvrir les volets militaire, humanitaire, économique et social (développement), diplomatique et politique, en particulier en matière de désarmement des groupes armés, de finalisation de la réserve nationale, afin d’intégrer les réservistes dans l’armée et de mettre ainsi fin aux multiples centres de commandement. Il a également souligné l’importance de la cohésion nationale et de la coopération régionale pour une prospérité partagée dans la région des Grands Lacs « qui aura tourné définitivement le dos à la guerre.»
- Amélioration des conditions de vie de populations : Kamerhe a insisté sur la nécessité de diriger les ressources vers les secteurs vitaux tels que la sécurité, la santé, l’éducation, l’agriculture, ainsi que l’accès à l’eau potable et à l’électricité. Il a également encouragé ses collègues à renforcer la lutte contre la pauvreté à travers des politiques budgétaires bien ciblées.
- Diversification de l’économie : selon le président de l’Assemblée nationale, « la dépendance excessive aux matières premières expose notre économie à des fluctuations imprévisibles. » Il est nécessaire, a-t-il estimé, « de promouvoir l'industrialisation, le développement du secteur agricole, ainsi que l'innovation dans les secteurs de l'énergie et des technologies, afin de bâtir une économie plus résiliente et durable.»
- Gouvernance et lutte contre la corruption : pour Kamerhe, « aucune réforme budgétaire ne portera ses fruits si nous n’améliorons pas la gestion des finances publiques. Il nous faut intensifier nos efforts pour assurer la transparence et la redevabilité dans l’utilisation des ressources de l’État.»
Dans ce cadre, il prévoit deux séances de travail, d’abord avec la Cour des comptes, organe d’audit sous tutelle de l’Assemblée nationale, puis conjointement avec la Cour des comptes et l’Inspection générale des finances (IGF). L’objectif est d’harmoniser le fonctionnement de ces deux institutions d’audit, qui seront appelées à soutenir le contrôle parlementaire que l’Assemblée nationale entend intensifier au cours de la législature « grâce à leur expertise avérée en la matière.»
3. Vers un regain de contrôle parlementaire
S’agissant du contrôle parlementaire, Kamerhe a relevé que le bureau de l’Assemblée nationale a enregistré « un nombre important de questions écrites adressées aux membres du gouvernement et à des mandataires des entreprises, établissements et services publics » et que « la plupart de ces initiatives ont trait aux problématiques, notamment de la bonne gouvernance, des réformes du secteur de la sécurité, du code agricole, de la loi foncière ».
Il a expliqué qu’il encourage ces initiatives car « c’est un engagement de campagne qu’[il] compte honorer » : « Ces initiatives vont, à coup sûr, contribuer à améliorer la gouvernance ». Cependant, le président de l’Assemblée nationale a prévenu que ce regain de contrôle parlementaire ne doit pas se transformer en acharnement. Au contraire, « un contrôle exercé de manière efficace éviterait aux parlementaires (...) de se substituer au gouvernement par la construction dans les fiefs électoraux, des ouvrages à caractère social, à l’instar de ponts, chaussées, écoles, centres de santé…».
4. Urgence sécuritaire
« Le peuple attend de nous ses représentants de prendre la mesure de ses préoccupations qui sont aujourd’hui au-delà du quotidien, la restauration de sa fierté et de sa dignité qui passent par le retour à la paix et à la totale souveraineté sur le sol de nos ancêtres. » En faisant ainsi allusion à la guerre à l’Est et aux foyers de violence dans d’autres parties du pays, Kamerhe a prié les députés à rester « attentifs à ce moment et [à prendre] les bonnes décisions qui vont favoriser l’intime besoin du congolais ».
5. Promesse d’une nouvelle image de la diplomatie parlementaire
Après avoir « saluer les pays membres de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie, dont la Côte d’Ivoire, pour le soutien exprimé à l’endroit de la RDC lors de la dernière session de cette organisation interparlementaire tenue en juillet à Montréal, au Canada », en condamnant la présence des troupes rwandaises sur le sol congolais, Kamerhe a indiqué que « le bureau de l’Assemblée nationale s’emploiera à donner un visage de marque à la diplomatie parlementaire par la désignation des délégués au sein des organisations interparlementaires, l’installation des groupes régionaux et des groupes d’amitié.»
6. Lutte contre le MPOX
Kamerhe a également lancé un appel à la population pour respecter les mesures dictées par les autorités pour lutter contre l’épidémie de MPOX. Il a promis, à cet effet, que l’Assemblée nationale va « apporter son appui au gouvernement dans les efforts de l’éradication de cette maladie en dégageant des fonds nécessaires pour le secteur de la santé en général et la gestion des épidémies en particulier.»
Photo : ouverture de la session de septembre 2024 à l'Assemblée nationale au Palais du peuple à Kinshasa, le 16 septembre 2024. Copyright : cellule de communication de l’Assemblée nationale.