À l'Assemblée nationale

Session parlementaire de mars 2025 : cinq points clés à retenir du discours de Kamerhe

19/03/2025

L’Assemblée nationale a ouvert, le samedi 15, sa session ordinaire de mars 2025, dans un contexte sécuritaire et politique préoccupant. Parmi les points clés de son discours, Vital Kamerhe, président de la chambre basse du Parlement, a évoqué la question de service militaire obligatoire ; l'examen de la loi portant lutte contre le tribalisme, le racisme et la xénophobie pour préserver la cohésion nationale ; l’examen des résolutions de la Cour des comptes et des rapports annuels des institutions d’appui à la démocratie. 

C’est une session qui s’est ouverte dans un contexte particulièrement « amère », marqué la dégradation de la situation sécuritaire dans la partie est du pays. Le Mouvement du 23 mars (M23) et l’Alliance Fleuve Congo (AFC), soutenus par l'armée rwandaise occupent depuis plusieurs jours les villes de Goma et de Bukavu dans l’est du pays. Au niveau politique, des consultations pour un gouvernement d’Union nationale devraient également débuter. Que retenir du discours du président de l’Assemblée nationale ? 

1. Crise sécuritaire et condamnation de l’agression rwandaise

Vital Kamerhe a dénoncé avec fermeté l’agression du Rwanda via le M23, saluant la bravoure des Forces armées de la RDC et des Wazalendo. Il a rappelé les avancées diplomatiques, notamment l’adoption de la résolution 2773 du Conseil de sécurité de l’ONU, qui désigne clairement le Rwanda comme agresseur. Tout en jugeant « insuffisantes » les sanctions internationales contre le Rwanda, Kamerhe a déclaré qu’elles étaient « une étape importante pour restaurer la vérité sur ce conflit ». 

Il a salué les actions diplomatiques de la Belgique, du Canada, de l’Allemagne et du Royaume-Uni et plus généralement de l'UE ainsi que ceux des organisations de la sous-région notamment de la SADC et de l’EAC qui sont « engagés aux côtés de la République démocratique du Congo pour assurer une paix durable dans le cadre des processus de Luanda et de Nairobi.» 

​​2. Renforcement de la diplomatie parlementaire

Le speaker de la chambre basse du Parlement a souligné que l’Assemblée nationale a intensifié son action diplomatique en obtenant d'une part des condamnations du Rwanda par l’Assemblée parlementaire francophone, d'une autre part une déclaration de solidarité pour la cessation de la guerre en RDC de la part du Parlement panafricain. 

« Le périple diplomatique engagé  par l’Assemblée nationale nous a conduit à rencontrer nos homologues de la France, de la Côte d’Ivoire, de l’Egypte, de la Mauritanie, du Ghana, du Maroc, de l’Afrique du Sud et plus récemment d’Israël, pour non seulement épingler l’implication du Rwanda dans la déstabilisation de la RDC, condamner la violation de notre intégrité nationale mais aussi appeler à des sanctions contre les forces d’agression », s’est-il réjoui. 

3. Examen des résolutions de la Cour des comptes et les rapports annuels des institutions d’appui à la démocratie

Dans le cadre du contrôle parlementaire, Kamerhe a annoncé que l’Assemblée nationale va examiner, pour avis, des résolutions de la Cour des comptes et les rapports annuels des institutions d’appui à la démocratie en RDC : la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) ; la Commission nationale des Droits de l’Homme (CNDH) et le Conseil supérieur de l'audiovisuel et de la communication (CSAC).

4. Vers un service militaire obligatoire pour les jeunes

Kamerhe a souligné l’engagement budgétaire de l’Assemblée nationale pour l’armée et a remercié les députés ayant contribué financièrement à l’effort de guerre. L'Assemblée nationale s’est engagée à un meilleur contrôle de l’utilisation des ressources destinées à la défense.

« ​L’Assemblée nationale s’est aussi engagée en tant qu’autorité budgétaire à accompagner les efforts du chef de l'État et de son gouvernement, notamment ceux visant l’amélioration des conditions de vie des hommes en uniforme. Cet engagement s’est reflété dans la loi de finances 2025 et continuera à animer les élus dans leur travail d’allocation des ressources publiques mais surtout de contrôle de l’effectivité de l’utilisation rationnelle des moyens destinés à l’effort de guerre », s'est-il expliqué.

Sans préciser les chiffres exacts, Kamerhe a ordonné au questeur de procéder dès le lundi, au versement des montants collectés au compte ouvert à cet effet.

Il a également plaidé pour l’augmentation des moyens destinés à l'armée. « Il ​​serait illusoire d’envisager la paix sans se doter de moyens militaires indispensables à sa pérennisation ». S’inscrivant dans la droite ligne du gouvernement qui mobilise les jeunes à intégrer l'armée, il a proposé aux élus nationaux d’étudier la possibilité d’introduire une initiative législative visant  à rendre le service national et militaire obligatoire, mobilisant la jeunesse congolaise pour la défense du pays.

« Je vous invite, honorables députés, à examiner la possibilité d’introduire sous la forme la mieux adaptée et selon la faisabilité technique et financière, le service national et le service militaire obligatoires, pour mobiliser de façon coordonnée et méthodique les forces vives de la nation, particulièrement notre jeunesse, au bénéfice de la défense nationale. » 

5. Priorités législatives de la session 

Face aux menaces internes et externes auxquelles est confronté le pays, Kamerhe a insisté sur l’importance de l’unité et de la cohésion nationale. Pour cela, il a appelé à combattre le tribalisme, la xénophobie et la désinformation, tout en encourageant un renforcement des capacités militaires congolaises. 

« J’en appelle ici aux dignes élus de notre peuple de s’engager avec sincérité dans la lutte contre toute forme de discrimination et stigmatisation pour rassembler les congolaises et congolais de toute origine et appartenance politique autour de l’impératif de préserver la paix et la sécurité, autant que l’intégrité de notre territoire pour les générations actuelles et futures ». 

C’est dans ce contexte qu’il a annoncé prioritaire l’initiative législative portant sur la lutte contre le tribalisme, le racisme et la xénophobie.  

« Alors que les forces de la division sont activement à l’œuvre et recherchent à tout prix à fragiliser la cohésion nationale, notamment à travers les réseaux sociaux, je voudrais en ma qualité de président de l’Assemblée nationale, vous encourager à user de toute votre influence au sein de la population et de la classe politique pour consolider cette unité, véritable rempart contre les assauts de l’ennemi et vecteur de mobilisation. »

 

Damien Kapay

Photo : une plenière à l'Assemblée nationale.@AssembleeNatRDC/Twitter