Trois questions à

André Tambwe Katambwe : « Pourquoi j’ai voté contre la proposition de loi portant protection et promotion des droits des peuples autochtones pygmées en RDC »

14/04/2021

L’Assemblée nationale a adopté, le 7 avril 2021, la proposition de loi portant protection et promotion des droits des peuples autochtones pygmées en RDC. Sur les 390 députés présents dans la salle, 389 ont voté pour et un s’y est opposé, selon le bureau. Trois questions à André Tambwe Katambwe, élu de la circonscription de Katako-Kombe, qui a dit non à ce texte législatif.

Talatala : comment expliquez-vous votre vote contre la proposition de loi portant protection des droits des peuples autochtones pygmées en RDC ?

André Tambwe Katambwe : J’ai voté contre l’adoption par l’Assemblée nationale de la proposition de loi portant promotion et protection des droits des peuples autochtones parce que sa nomenclature est anticonstitutionnelle. Notre Constitution, dans son préambule, parle d’un peuple et consacre ainsi l’existence d’un seul peuple. 

C’est pourquoi qualifier de « peuple » une communauté congolaise constitue une déviation de l’esprit de notre Loi fondamentale. Nous risquons d’avoir un peuple autochtone pygmée, un peuple non autochtone bantou, un peuple non autochtone nilotique. 

Aussi la base constitutionnelle évoquée est-elle mal empruntée : que ce soit l’article 122 ou l’article 123, aucune de ces dispositions ne mentionne l’autochtonie comme critère de légifération. Ce qui constitue en effet l’exigence des protections légales, c’est la vulnérabilité.  

N’est-il pas important de promouvoir des mesures de discrimination positive en faveur de ces populations défavorisées ?

Le mécanisme emprunté est scientifiquement biaisé. Il n’y a pas que la communauté pygmée qui soit mal traitée et, par conséquent, seule bénéficiaire d’une protection particulière. Nous avons également les Banyamulenge qui sont stigmatisés à outrance et tant d’autres communautés. Il aurait fallu parler de groupes minoritaires, vulnérables à travers le pays. Cela aurait eu l’avantage d’inclure les pygmées et d’élargir le champ d’intervention de la loi aux autres communautés non identifiées par le concept « pygmée ».

Quelles alternatives à l’actuelle proposition de loi disposez-vous pour promouvoir les droits desdites populations ?

Lors des plénières préparatoires en commission, j’ai fourni plusieurs variations lexicales pouvant traduire l’importance et la protection des droits des pygmées. Nous aurions pu par exemple parler de la « loi protégeant les minorités vulnérables ». Cette formulation aurait rencontré l’esprit de notre Constitution. D’autant que les pygmées sont compris dans ces minorités vulnérables.  

Propos recueillis par Ange Makadi.