Travail parlementaire

Que deviennent des propositions de loi initiées par les députés qui ont opté pour des fonctions incompatibles ?

10/05/2021

Lorsqu’un élu accepte une fonction incompatible avec son mandat de député national, celui-ci est suspendu. C’est le cas des ministres nommés au gouvernement Sama. Qu’en est-il de propositions de loi qu’ils ont initiées à l’Assemblée nationale ?

Le gouvernement Sama Lukonde a fait part belle aux députés nationaux, avec la présence d’au moins 20 élus nommés ministres. La question se pose alors sur le sort des initiatives législatives dont ils étaient porteurs, d’autant que leur mandat de député est suspendu.

La proposition de loi déposée appartient en effet à son initiateur jusqu'à ce qu'elle soit portée en plénière, que son auteur en présente l'économie et que le débat général soit organisé. « Dans notre système parlementaire, les propositions de loi continuent à appartenir à leurs auteurs jusqu'à ce qu'elles soient déclarées recevables par l'assemblée plénière. Elles ne deviennent propriétés de l'Assemblée nationale que si, à la suite du débat de recevabilité, l'assemblée plénière se prononce favorablement. Si la plénière déclare une proposition non recevable, cette dernière est renvoyée à l'auteur », confirme à Talatala le député Daniel Mbau

En conséquence, si la proposition de loi est déclarée recevable, elle suivra son cours normal, que son auteur soit, ou pas, là. Au cas où l'auteur ne serait plus là pour défendre son initiative, le président ou coprésident de la commission qui avait la proposition en étude et les autres membres en assurent la défense jusqu'à l'adoption.

Il en est par exemple de la proposition de loi organique de Christophe Lutundula, nommé vice-premier ministre chargé des Affaires étrangères, relative à l’organisation et au fonctionnement de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni). Le débat sur sa recevabilité s’est réalisé dans les huit jours dont dispose Christophe Lutundula pour choisir entre le mandat de député et les nouvelles fonctions de membre du gouvernement, les deux étant incompatibles. Le député ayant choisi d’être ministre, sa proposition de loi va suivre toute la procédure législative et sera défendue désormais par la commission politique, administrative et juridique (PAJ).

Dans le cas inverse, c’est-à-dire si la proposition a été simplement déposée et qu'elle n'a pas été soumise à un débat en plénière ni à un vote de recevabilité, l'Assemblée nationale n’en portera pas la responsabilité. Elle tombe ainsi caduque, faute de parrain. C'est le cas notamment de trois propositions de loi de Tony Mwaba et d'une proposition de loi de Butondo Muhindo Nzangi. Toutefois, leurs auteurs, tous les deux nommés ministres, peuvent soit les faire endosser par d'autres députés, c'est-à-dire les réintroduire comme propositions portées par d’autres députés, soit les présenter comme projets de loi après approbation en conseil des ministres le gouvernement. Dans la deuxième alternative, ils seront défendus devant Parlement par le ministre qui coiffe le collège juridique.

Berith Yakitenge

Photo : Albert Puela, député nommé ministre des Droits humains dans le gouvernement Sama. Copyrigth : @AssembleeN_RDC/Twitter